Almaghrib No 72 - 19 septembre 1937

Malgré toutes les mesures prises par l'Administration pour contenir notre propagande dans un cercle limité, en interdisant aux Marocains d'avoir accès aux journaux arabes et français pendant très longtemps, et en utilisant la presse coloniale pour nous combattre et porter contre notre mouvement les pires des accusations dont il est innocent, le droit ne condamne pas toujours ses partisans qui le soutiennent et le défendent. Or, notre mouvement n'est autre que l'expression d'un droit précis et nos revendications celle des doléances de la nation. Nos objectifs ne visent rien d'autre que ses intérêts et la défense de ses droits.

C'est la raison pour laquelle les Français épris de liberté nous ont soutenus et n'ont pas hésité à défendre notre cause après avoir pris connaissance de nos objectifs et de nos idées, et se distancer de tous les tissus de mensonges dont on nous affublait ainsi que des buts poursuivis par les colonialistes qui recouraient à de tels procédés.

Des intrigants ont cherché à exploiter les évènements de Meknès pour discréditer notre mouvement et déformer notre ligne de conduite en nous attribuant ce dont nous sommes totalement blanchis. Mais toutes ces tentatives et toutes ces campagnes de dénigrement n'ont eu aucun effet sur ceux qui connaissent la vérité au sujet de nos revendications et apprécient la justesse de notre orientation. Ceux-là sont convaincus de la légitimité de notre cause, et nous les avons vus aux premières lignes affronter les Français résidant au Maroc, essayant de les persuader de nos bonnes intentions et de leur présenter des évènements une image réelle et exempte de toute déformation.

"Le Maroc socialiste", "le pays socialiste" et "la dépêche de Fès" ont publié des articles où se dégage l'accent de la vérité et où les évènements sont commentés en toute objectivité. Il en est de même en France où la presse de gauche ne s'est pas laissée influencer par les prétentions fallacieuses ni par les fausses accusations portées sur nous par la presse colonialiste. Elle a dépêché des correspondants au Maroc pour s'enquérir de la situation et constater les faits in situ, et a publié sur les évènements des commentaires qui renforcent notre position et nous encouragent à ne pas désespérer du Français libre.

Parmi ces correspondants, il y a lieu de citer particulièrement Mr Baz et son épouse Mme Baz qui, elle, fait partie du "Comité de Soutien des Revendications Marocaines", est en même temps membre de la Commission d'Enquête chargée d'instruire les questions des protectorats et des colonies, et collabore dans "le Populaire" qui est l'organe officiel du Parti Socialiste. Elle a publié un article retentissant, dans lequel elle a analysé la situation et décrit ce qu'elle a constaté de visu dans un style d'une grande force de persuasion.

Tant que nous trouvons auprès des hommes libres de France cet intérêt et cette franchise, nous ne perdrons pas espoir, et nous demeurerons convaincus que notre cause finira par triompher, malgré les allégations de la presse colonialiste, et que la vérité sautera aux yeux du public français qui saura que notre mouvement n'a qu'un seul but: être au service du peuple marocain, loin de tout autre dessein, et coopérer avec le gouvernement en vue de réaliser cet unique objectif.