Almaghrib - No spécial à l'occasion de la commémoration du 40ème jour de la disparition de Saïd Hajji - 6e année - No 937 - 29 avril 1942

Hier a eu lieu la cérémonie commémorative du regretté pour sa jeunesse et ses talents Saïd Hajji, dont la disparition constitue une perte inestimable pour le Maroc. Cette cérémonie, qui a pris des proportions d'une très grande manifestation, a été organisée par un groupe de ses fidèles amis. Elle a connu la participation d'un nombre important d'orateurs qui ont prononcé à cette occasion des allocutions mettant en exergue les qualités intrinsèques du défunt et ses dispositions naturelles telles que la souplesse de caractère, la hauteur de vues, l'abnégation au travail et une e xtrême modestie dans la notoriété. Un public nombreux en provenance de toutes les régions du Maroc s'est empressé d'exprimer sa considération pour la personnalité du défunt ainsi que son admiration pour l'oeuvre qu'il a accomplie.

Ses amis, sa famille littéraire et ses concitoyens se sont tous quelque peu acquittés de leur devoir à l'égard du disparu, si bien qu'il ne serait pas exagéré de dire que la cérémonie de commémoration a revêtu le caractère d'une cérémonie de reconnaissance.

Sa famille littéraire directe a rempli une partie de son devoir en continuant l'oeuvre entâmée par le défunt au service de notre chère patrie et en s'engageant à s'acquitter au mieux de ses possibilités de cette "noble responsabilité" qu'il lui a léguée.

Les amis du défunt, le cercle littéraire qui était groupé autour de lui et ses concitoyens ne pourraient être à la mesure de ce qu'il en attendait qu'en restant unis et solidaires dans l'accomplissement de l'oeuvre qu'il a initiée, et en veillant, chacun dans son domaine, à promouvoir ses projets et concrétiser ses souhaits et les visions qu'il n'a pas pu réaliser lui-même pendant sa très courte vie.

Le devoir de tous les assistants directs du disparu est de rester groupés au sein de la famille intellectuelle qu'il a constituée et jetée dans la plus terrible perplexité après sa disparition. Leur devoir est de ne pas se départir du sentiment de fraternité qui unit les coeurs et de rester toujours fidèles à l'oeuvre à accomplir dans l'intérêt de la patrie. Le devoir de la famille littéraire formée par la volonté du défunt est d'éclairer l'opinion publique sur les problèmes nationaux, de lui dispenser les conseils nécessaires, d'apporter sa contribution à toute activité productive et d'agir bien entendu dans l'intérêt exclusif de la nation et de son progrès. Le public de nos concitoyens, pour sa part, se doit de soutenir par ses encouragements ceux qui se considèrent comme les continuateurs de l'oeuvre du disparu. Notre fidélité vis-à-vis de Saïd n'est en réalité que l'expression personnifiée de notre fidélité à la nation et à l'intérêt général qui était son leit motiv permanent.

Les amis fidèles ont rempli également une partie de leur devoir en veillant à l'exécution de ses projets, en continuant d'y participer comme de son vivant, et en organisant une soirée commémorative au cours de laquelle ils ont témoigné de la place qu'occupait chez eux le cher disparu, et mis en évidence leur considération pour le bilan de ses activités en faveur de la nation qu'il ambitionnait de servir partout et toujours avec abnégation et sincérité.

Quant à ses honorables concitoyens, ce n'est pas la première fois qu'ils ont eu l'occasion de lui faire part de leur attachement; ils le lui ont exprimé à maintes reprises de son vivant. Le jour de son enterrement était un jour de deuil national, ressenti comme tel à travers tout le Maroc, y compris les contrées les plus reculées où sa réputation l'avait précédé. Hier encore, ils ont rempli eux aussi une partie de leur devoir vis-à-vis de Saïd, avec leur présence massive à la cérémonie commémorative du 40ème jour de sa disparition.

Kacem Zhiri