Le Directeur du journal "Almaghrib" rejoint le Seigneur
"Almaghrib" - No 905 du 4 mars 1942
Le texte de cette traduction a été trouvé parmi les documents de la période du Protectorat français au Maroc déposés au Centre d'Archives de Nantes
La mort s'est abattue, le malheur a frappé. Montrons une sereine résignation. Hier s'est éteinte une âme pure. Elle a rejoint la protection du Seigneur, satisfaite et agréée de Dieu. Cette âme a choisi les espaces du paradis et l'immense éternité pour y demeurer.
Saïd est mort, Ô terrible évènement, Ô immense affliction. Ô Dieu! obéissons à ta volonté et inclinons-nous devant ce qu'a décrété Ta Sagesse.
Après une cruelle maladie, contre laquelle nul remède n'a été de quelque utilité et qui a duré près de quatre mois, le Directeur du journal "Almaghrib", Saïd Hajji - que Dieu ait pitié de lui - a quitté cette demeure périssable et a rejoint l'Ami Suprême dans la nuit du mardi 14 safar 1361 (nuit du lundi 2 au mardi 3 mars 1942).
La nouvelle de sa mort a eu un profond retentissement et la douleur s'est emparée de toutes les classes de la société, en particulier de l'élément nationaliste militant, dont le défunt - que Dieu lui soit Clément - était l'un des piliers et l'une des plus importantes personnalités.
A peine cette nouvelle s'était-elle répandue que les délégations et les gens, en foule, se rendirent au domicile du défunt pour présenter leurs condoléances à sa famille et à ses nombreux amis, et exprimer leur affliction et leur douleur pour la perte d'un "jeune" qui était à la tête de la jeunesse active, agissante et pleine d'aptitudes, et qui a donné pendant sa courte vie les preuves d'une rare capacité et d'une incomparable activité.
Les obsèques du cher disparu se sont déroulées au milieu d'une foule composée de gens de toutes les classes. Le corps - que Dieu le couvre de sa miséricorde - était recouvert d'un drapeau marocain et entouré de nos frères nationalistes venus de Casablanca, Rabat, Kénitra et d'un grand nombre de hautes personnalités marocaines dont quelques vizirs et de hauts fonctionnaires.
S.E. le Résident Général, le Général Noguès, s'était fait représenter aux obsèques par deux membres de son cabinet: le capitaine de Battesti et le capitaine Kittani. Le commandant Olie représentait le Directeur des Affaires Politiques. Etaient également présents le capitaine Charles Dominique, chef du Bureau de la Presse arabe et les autorités locales de Rabat-Salé, ainsi que les Ulémas et les notables ayant à leur tête S.E. le Pacha de Salé.
Le très savant Mufti Boubker Zniber prononça quelques mots sur la tombe du disparu, puis le Fqih Mohammed Ghazi prit la parole au nom de nos frères nationalistes. Le poète Abdelghani Skirej lut un magnifique poème. Enfin, l'ami du cher disparu, Boubker Kadiri, parla à son tour. Ses paroles produisirent une profonde émotiion. La plupart des gens présents pleuraient et l'on entendait s'élever le bruit de leurs sanglots.
Quelques heures à peine après le décès, parvenaient de nombreux télégrammes de condoléances envoyés de différents points du pays à l'occasion de ce malheur.
Au nom de la famille "Almaghrib", des parents et des nombreux amis du défunt, nous les remercions tous d'avoir compati de tout coeur à ce grand malheur. Nous présentons nos plus vives condoléances à nos compatriotes marocains et leur envoyons nos consolations pour l'épreuve qui les a frappés. Nous demandons à Dieu le Clément qu'Il reçoive le défunt dans le sein de Sa Miséricorde et lui accorde le pardon.