Bilan et perspectives
Le Comité d'Action Nationale a tenu les assises de son premier congrès à Rabat le 25 octobre 1936. Ont pris part à cette manifestation quatre vingt dix délégués représentant les centres de Rabat, Salé, Kénitra, Fès, Meknès, Taza, Oujda, Marrakech, Safi, Mazagan (El Jadida) et Casablanca.
Le congrès a été ouvert à 21 heures par le leader Allal El Fassi. Dans le rapport moral qu'il a présenté, il a fait le bilan d'activités des six dernières années ainsi que des résultats obtenus au cours de cette période. Son exposé s'est terminé sur une note d'optimisme, en faisant confiance au Gouvernement du Front Populaire représenté par le Général Noguès en sa qualité de Résident Général de la République Française au Maroc pour la mise en oeuvre du plan de réformes soumis par le Comité dans "le Cahier des Revendications du Peuple Marocain".
A l'issue de ce discours d'ouverture, Mohammed Elyazidi a donné lecture d'une déclaration précisant la ligne politique que le Comité d'Action Nationale envisageait de suivre pour faire aboutir le programme des revendications qu'il avait présenté dès 1934 à Sa Majesté le Roi ainsi qu'au Gouvernement de la République et à la Résidence Générale de France à Rabat. Les délégués des différentes villes représentées au congrès se sont ensuite relayés à la tribune.
Saïd Hajji a pris la parole au nom de la branche de Salé du Comité d'Action Nationale; Il a apporté l'appui de ses mandataires à l'action menée par le Comité depuis sa création et émis une série d'observations de nature à renforcer la cohésion au sein de l'organisation et à donner encore plus de crédibilité aux demandes de réformes dont le pays attendait la concrétisation.
Prenant la parole, le leader Allal El Fassi a répondu aux suggestions formulées par les différents délégués en précisant qu'elles entraient toutes dans la ligne politique du parti et qu'elles allaient dans toute la mesure du possible être prises en considération.
Le congrès a ensuite examiné la version résumée des revendications pour ne retenir dans un premier stade que celles qui revêtaient un caractère d'urgence. La discussion qui s'en est suivie a permis à une grande partie des délégués de justifier la priorité qu'ils accordaient aux revendications qui leur semblaient les plus immédiates, montrant ainsi le grand intérêt qu'ils portaient aux questions d'intérêt national. A l'issue de ce débat qui s'est prolongé pendant plus de 4 heures, les congressistes ont adopté une motion approuvant le texte définitif des "Revendicqations urgentes" ainsi que la formulation des télégrammes destinés à Sa Majesté le Sultan, au Ministère des Affaires Etrangères du Gouvernement de la République et au Résident Général de France au Maroc.
Les Revendications Immédiates
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Libertés démocratiques
Reconnaissance des libertés de presse, d'association, de circulation, d'appartenance syndicale, d'enseignement, de réunion et de pétition.
Amnistie générale pour tous les déportés, exilés et détenus politiques depuis l'établissement du Protectorat.
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Enseignement
Unification des programmes d'enseignement sur tout le territoire marocain
Multiplication du nombre des écoles primaires
Développement de l'enseignement secondaire
Organisation de missions scolaires pour la France et l'Orient et octroi de bourses, de prêts d'honneur pour le développement de l'enseignement supérieur
Création d'écoles ou de sections normales d'instituteurs et d'institutrices
Application rigoureuse du programme réorganisant l'enseignement à l'Université de la Karaouiyine
Ouverture d'écoles spécialisées dans l'enseignement agricole
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Justice
Recrutement des magistrats et de leurs auxiliaires par voie de concours et prise en charge de leur rémunération sur le budget de l'Etat, non sur les moyens d'existence des justiciables et des administrés
Séparation des pouvoirs administratif, exécutif et judiciaire, et indépendance des magistrats vis-à-vis de l'autorité administrative
Institution d'un régime judiciaire uniforme s'étendant aux villes et aux campagnes marocaines
Création d'une justice administrative et d'un conseil de discipline pour les magistrats marocains
Abolition de la politique des "grands caïds"
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Agriculture
Abolition de "la colonisation officielle" et abrogation des textes et circulaires assimilant l'expropriation pour la création de périmètres de colonisation à l'expropriation pour cause d'utilité publique
Création d'un bien de famille inaliénable en utilisant les terres collectives et les biens domaniaux
Extension du crédit agricole au fellah
Instauration d'une égalité absolue entre les fellahs et les colons tant au niveau des obligations qui incombent à chacune des deux parties qu'à celui des droits qui devraient leur être indistinctement reconnus par la loi.
Répression de l'usure et protection des fellahs contre les exactions des colons, des agents de l'autorité ou du fisc
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Ouvriers et Artisans
Application des lois sociales françaises aux travailleurs marocains
Rénovation de l'artisanat et protection de la production artisanale contre le dumping étranger
Retour pour le transport en commun à la réglementation antérieure à 1932
Assistance aux chômeurs marocains
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Impôts
Dégrèvement des impôts et égalité fiscale entre Marocains et Français
Suppression des "droits de porte", des "droits de marché" et des "droits de paccage dans les forêts"
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Santé publique
Multiplication du nombre des établissements sanitaires et intensification de la distribution gratuite des médicamments aux nécessiteux
Lutte permanente et intense contre "les taudis et les habitations insalubres" dans les villes et les campagnes
Lutte contre l'alcoolisme, les stupéfiants et la prostitution publique et clandestine
Construction en nombre suffisant d'asiles pour vieillards et indigents et octroi de subventions aux organismes d'assistance publique marocains.